Darwin, théoricien du racisme

Vittorio Messori

Vittorio Messori

En par­lant de livres cen­su­rés, il y en a un qui l’est depuis sa publi­ca­tion dans la secon­de moi­tié du XIXè siè­cle. Je veux bien sûr par­ler « De l’origine des espè­ces au moyen de la sélec­tion natu­rel­le ou la pré­ser­va­tion des races favo­ri­sées dans la lut­te pour la vie ».  Il est de noto­rié­té publi­que que ses recher­ches aient ser­vi de base au soi-disant « athéi­sme scien­ti­fi­que », pro­ba­ble­ment en dépit des inten­tions de son auteur.  Ce que l’on igno­re en revan­che, c’est que ce scien­ti­fi­que est enter­ré dans la cathé­dra­le de Westminster, qu’il était diplô­mé de théo­lo­gie à l’université de Cambridge et que sa théo­rie n’excluait en aucu­ne maniè­re un Créateur mais qu’elle sup­po­sait que Dieu avait éta­bli les lois natu­rel­les de l’univers, lais­sant ensui­te agir la néces­si­té et le hasard au sein de cet­te struc­tu­re.  Il est cepen­dant mani­fe­ste qu’un « évo­lu­tion­ni­sme » au pied de la let­tre est de fait incom­pa­ti­ble avec la foi en Dieu.  Il sem­ble que Darwin par­ta­geait lui aus­si ce point de vue, ce qui n’empêcha pas plu­sieurs de ses lec­teurs de se reven­di­quer de lui pour sou­te­nir leurs thè­ses athées.  Comme disait l’autre : « malheur à celui qui a des disci­ples ! » car ces der­niers ont bien sou­vent ten­dan­ce à radi­ca­li­ser les théo­ries de leurs maî­tres.

Darwin était un théo­lo­gien et croyait en Dieu

Pour en rester à quel­ques cas extrê­mes, je pos­sè­de dans ma biblio­thè­que un essai sur ce scien­ti­fi­que anglais rédi­gé par un ex-séminariste de Coni, Piergiorgio Odifreddi, selon lequel l’humanité doit beau­coup à Darwin (qu’il défi­nit com­me « un des plus grands génies de l’histoire ») pour avoir fon­dé l’athéisme moder­ne. J’ai éga­le­ment sous les yeux une inter­view du zoo­lo­gue Giorgio Celli qui avait acquis une cer­tai­ne noto­rié­té grâ­ce ses émis­sions de télé­vi­sion mais sur­tout grâ­ce à ses tra­vaux de natu­ra­li­ste et ses incur­sions heu­reu­ses dans le champ lit­té­rai­re.  Celli, qui niait farou­che­ment l’existence d’un Dieu créa­teur, se réjouis­sait d’ailleurs d’avoir décou­vert dès sa plus ten­dre enfan­ce Darwin qui fut pour lui « plus qu’un maî­tre, un véri­ta­ble saint pro­tec­teur de tou­te ma vie ».

Celui qui nour­rit une tel­le admi­ra­tion pour Darwin ne peut cepen­dant pas avoir lu entiè­re­ment L’Origine des espè­ces, une cho­se que l’immense majo­ri­té des soi-disant intel­lec­tuels qui vénè­rent Darwin se gar­de d’ailleurs bien de fai­re.

Personne n’e­st assez igno­rant pour per­met­tre aux ani­maux débi­les de se repro­dui­re

Choisissons un extrait par­mi tant d’autres : « l’homme civi­li­sé a un désa­van­ta­ge sur le sau­va­ge. Chez les sau­va­ges, les indi­vi­dus fai­bles de corps ou d’esprit sont promp­te­ment éli­mi­nés, et les sur­vi­van­ts se font ordi­nai­re­ment remar­quer par leur vigou­reux état de san­té. Quant à nous, hom­mes civi­li­sés, nous fai­sons, au con­trai­re, tous nos efforts pour arrê­ter la mar­che de l’élimination ; nous con­strui­sons des hôpi­taux pour les idio­ts, les infir­mes et les mala­des ; nous fai­sons des lois pour venir en aide aux indi­gen­ts ; nos méde­cins déplo­ient tou­te leur scien­ce pour pro­lon­ger autant que pos­si­ble la vie de cha­cun. On a rai­son de croi­re que la vac­ci­ne a pré­ser­vé des mil­liers d’individus qui, fai­bles de con­sti­tu­tion, aura­ient suc­com­bé à la vario­le. Les mem­bres débi­les des socié­tés civi­li­sées peu­vent donc se repro­dui­re indé­fi­ni­ment. Or, qui­con­que s’est occu­pé de la repro­duc­tion des ani­maux dome­sti­ques sait, à n’en pas dou­ter, com­bien cet­te per­pé­tua­tion des êtres débi­les doit être nui­si­ble à la race humai­ne. On est tout sur­pris de voir com­bien le man­que de soins, ou même des soins mal diri­gés, amè­nent rapi­de­ment la dégé­né­re­scen­ce d’une race dome­sti­que ; en con­sé­quen­ce, à l’exception de l’homme lui-même, per­son­ne n’est assez igno­rant ni assez mala­droit pour per­met­tre aux ani­maux débi­les de repro­dui­re… »

On devrait inter­di­re aux pau­vres de se marier

En voi­ci un autre : « les deux sexes devra­ient s’interdire le maria­ge lorsqu’ils se trou­vent dans un état trop mar­qué d’infériorité de corps ou d’esprit. Quiconque con­tri­bue­ra à empê­cher ces maria­ges ren­dra grand ser­vi­ce à l’humanité ».

Ou enco­re : « Ceux qui ne peu­vent évi­ter une abjec­te pau­vre­té pour leurs enfan­ts devra­ient évi­ter de se marier par­ce que la pau­vre­té est non seu­le­ment un fléau mais elle tend à empi­rer » et aus­si : « les mem­bres infé­rieurs de la socié­té fini­ront par sup­plan­ter les meil­leurs ».

Et on pour­rait enco­re con­ti­nuer. Darwin croyait pro­ba­ble­ment en un Dieu créa­teur mais il n’est pas très faci­le de con­ci­lier ce Dieu avec celui de l’Evangile.  Il est par con­tre un fait que ceux qui le con­si­dè­rent com­me un grand génie se gar­dent bien de par­ta­ger les con­sé­quen­ces logi­ques de ses recher­ches.

Un com­men­tai­re de Vittorio Messori publié par Antonio Margheriti, tra­duit de l’i­ta­lien et repro­duit avec son aima­ble auto­ri­sa­tion.

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