Je suis peut-être un puritain mais certainement pas un moraliste, je suis l’archétype du puritain catholique, rien à voir avec la version protestante : je m’applique cette rigueur intransigeante à moi-même (si bien que souvent, le problème n’est que Dieu me pardonne ou pas mais bien que je me pardonne à moi-même) et jamais aux autres. Et pourtant je ne suis même pas un sentimental. Je suis un passionné, certes, mais je ne me laisse pas emporter par des sentiments faciles. Voilà pourquoi l’argent ne me dégoûte pas, je ne le condamne pas et j’ai même une certaine admiration pour les riches quand ils sont prodigues de leurs richesses et qu’ils les utilisent pour faire de grandes choses pourvu qu’ils ne tombent pas dans l’avarice. Quand ils ouvrent les portes de leurs propriétés, ils agissent dans le monde, ils ne font pas qu’accumuler, ils contribuent par leur argent à construire la civilisation. Ceux-là sont bénis de Dieu et je les admire. Aucun problème avec l’argent donc.
L’argent est important mais l’Eglise n’en a pas besoin
Je ne suis pas un grand admirateurs des lefébvristes, bien au contraire, on peut même dire que je fais partie de leurs détracteurs mais ceux qui ont connu cet homme savaient qu’il émanait de lui une espèce de bonté au doux parfum d’innocence. Il faut savoir que parfois, il fallait plusieurs millions pour réparer un toit ou une église et que Monseigneur Lefebvre n’avait jamais un sou vaillant. Pourtant, cela ne l’inquiétait pas le moins du monde : « vous verrez qu’en dernière minute, la Providence nous aidera » disait-il toujours. Et de fait, quand venait le moment de payer, un donateur sorti de nulle part ne manquait jamais de se manifester.
Voilà pourquoi je n’ai jamais trop partagé cette conviction cléricale qu’il faudrait beaucoup d’argent. Ma longue expérience dans les sacristies m’a montré qu’il y a toujours trop d’argent qui arrive et qu’on le gaspille : les prêtres dilapident l’argent non pas par méchanceté mais parce que ce n’est pas leur charisme, ils ne savent tout simplement pas comment gérer l’argent.
Je ne vois pas cet urgence de l’argent, je n’arrive pas à comprendre cette obsession cléricale pour l’argent : l’église allemande est la deuxième plus grande entreprise du pays, elle est d’une efficacité bureaucratique redoutable et pourtant c’est l’Eglise la plus pauvre du monde en ce qui concerne la foi… et nous le constatons aujourd’hui qu’ils gouvernent Rome à travers celui qu’ils ont élu.
C’est la raison pour laquelle je ne vois pas l’intérêt de payer le denier du culte. Je pourrais me convaincre de payer pour ne pas que mes sous aillent à l’Etat mais me dire « je suis catholique donc je donne à l’Eglise », non. Parce que ça ne sert à rien, à tout le moins tant qu’il y a la foi. L’argent n’est nécessaire que lorsque l’on a perdu la foi. J’ai vu des grands saints sanctifier des populations entières alors qu’eux-mêmes vivaient dans la misère.
A ce propos, j’aime à rappeler ce que disait Carlo Carretto : « Il y a les blasphèmes vulgaires prononcés en rue par les hommes impies et il y a les blasphèmes prononcés par les chrétiens superficiels dans lieux sacrés. En voici un : « l’apostolat est impossible sans argent ». Faire de l’apostolat signifie poursuivre l’œuvre de Jésus et répondre à son invitation pressante. (…) Quelle action Jésus a-t-il donc accomplie qui soit irréalisable sans argent ? Prier peut-être ? Ou alors souffrir ? Aimer ? Parler ? Guérir ? Ou bien mourir ? »