Motu proprio Traditionis custodes du Saint-Père François (traduction française)

Le Pape François vient de publier un motu pro­prio qui, en pra­ti­que, va for­te­ment restrein­dre la célé­bra­tion de la for­me extraor­di­nai­re du rite romain, éga­le­ment appe­lée “mes­se de saint Pie V” ou mes­se tri­den­ti­ne.

Ce motu pro­prio sti­pu­le qu’il n’e­xi­ste désor­mais offi­ciel­le­ment plus qu’u­ne seu­le for­me du rite romain : “Art. 1. les livres litur­gi­ques pro­mul­gués par les sain­ts papes Paul VI et Jean-Paul II, en con­for­mi­té avec les décre­ts du Concile Vatican II, sont l’u­ni­que expres­sion de la ‘lex oran­di’ du rite romain.”
Le Pape François, après avoir con­sul­té les évê­ques du mon­de entier, a déci­dé de modi­fier les règles régis­sant l’u­ti­li­sa­tion du mis­sel de 1962, libé­ra­li­sé sous le nom de «rite romain extraor­di­nai­re» il y a qua­tor­ze ans par son pré­dé­ces­seur Benoît XVI.

Aujourd’hui, le Souverain Pontife publie le motu pro­prio inti­tu­lé Traditionis custo­des, sur l’u­sa­ge de la litur­gie romai­ne d’avant 1970, l’ac­com­pa­gnant d’u­ne let­tre dans laquel­le il expli­que les rai­sons de sa déci­sion: Douter du Concile, expli­que François, « signi­fie dou­ter des inten­tions mêmes des Pères, lesquels ont solen­nel­le­ment exer­cé leur pou­voir col­lé­gial cum Petro et sub Petro au cours du Concile Œcuménique, et, en défi­ni­ti­ve, dou­ter de l’Esprit Saint lui-même qui gui­de l’Église ».

Concrètement, les mes­ses sui­vant l’an­cien rite pour­ront plus être dites dans les égli­ses parois­sia­les. C’est l’é­vê­que qui déter­mi­na les lieux et les horai­res de ces célé­bra­tions. Les lec­tu­res seront obli­ga­toi­re­ment « en lan­gue ver­na­cu­lai­re », selon les tra­duc­tions approu­vées par les con­fé­ren­ces épi­sco­pa­les. Le célé­brant doit être un prê­tre délé­gué par l’é­vê­que.

Les prê­tres ordon­nés après la publi­ca­tion du Motu pro­prio d’au­jour­d’­hui, et qui ont l’in­ten­tion de célé­brer selon le mis­sel pré­con­ci­liai­re, « doi­vent adres­ser une deman­de for­mel­le à l’é­vê­que dio­cé­sain qui con­sul­te­ra le Siège Apostolique avant de don­ner son auto­ri­sa­tion ». Quant à ceux qui le font déjà, ils doi­vent deman­der à l’é­vê­que dio­cé­sain la per­mis­sion de con­ti­nuer à célé­brer cet­te mes­se.

En outre, la créa­tion de nou­veaux grou­pes sou­hai­tant célé­brer la mes­se de saint Pie V est désor­mais inter­di­te.

Voici la tra­duc­tion de ce motu pro­prio réa­li­sée par nos soins :

Lettre apostolique en forme de « motu proprio » du Saint-Père François « Traditionis custodes »

Sur l’usage de la litur­gie romai­ne anté­rieu­re à la réfor­me de 1970.

Gardiens de la tra­di­tion, les évê­ques, en com­mu­nion avec l’évêque de Rome, con­sti­tuent le prin­ci­pe et le fon­de­ment visi­ble de l’unité dans leurs Églises par­ti­cu­liè­res. Sous la con­dui­te de l’Esprit-Saint, à tra­vers l’annonce de l’Évangile et par la célé­bra­tion de l’Eucharistie, ils régis­sent les Églises par­ti­cu­liè­res qui leur sont con­fiées.

Afin de pro­mou­voir la con­cor­de et l’unité de l’Église, avec une sol­li­ci­tu­de pater­nel­le envers ceux qui dans cer­tai­nes régions adhè­rent à des for­mes litur­gi­ques anté­rieu­res à la réfor­me vou­lue par le Concile Vatican II, mes véné­ra­bles pré­dé­ces­seurs saint Jean-Paul II et Benoît XVI ont con­cé­dé et régu­lé la facul­té d’utiliser le Missel Romain édi­té par saint Jean XXIII en 1962. De cet­te maniè­re, ils ont vou­lu « faci­li­ter la com­mu­nion ecclé­sia­le de ces catho­li­ques qui se sen­tent liés à cer­tai­nes for­mes litur­gi­ques pré­cé­den­tes » et non à d’autres.

Dans la fou­lée de l’initiative de mon véné­ra­ble pré­dé­ces­seur Benoît XVI d’inviter les évê­ques à véri­fier l’application du motu pro­prio Summorum Pontificum, trois ans après sa publi­ca­tion, la Congrégation pour la Doctrine de la foi a pro­cé­dé à une enquê­te auprès des évê­ques en 2020, dont les résul­ta­ts ont été atten­ti­ve­ment étu­diés à la lumiè­re de l’expérience accu­mu­lée ces der­niè­res années.

À pré­sent, étant don­né les sou­hai­ts for­mu­lés par l’épiscopat et après avoir enten­du l’avis de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, je dési­re, avec cet­te Lettre Apostolique, per­sé­vé­rer davan­ta­ge dans la recher­che con­stan­te de la com­mu­nion ecclé­sia­le. C’est pour­quoi j’ai con­si­dé­ré oppor­tun d’établir ce qui suit :

Art. 1 : Les livres litur­gi­ques pro­mul­gués par les sain­ts papes Paul VI et Jean-Paul II, en con­for­mi­té avec les décre­ts du Concile Vatican II, sont l’unique expres­sion de la lex oran­di du rite romain.

Art. 2 : C’est à l’évêque dio­cé­sain, en tant que modé­ra­teur, pro­mo­teur et gar­dien de tou­te la vie litur­gi­que dans l’Église par­ti­cu­liè­re qui lui est con­fiée, de régle­men­ter les célé­bra­tions litur­gi­ques dans son pro­pre dio­cè­se. L’usage du Missale Romanum de 1962 dans le dio­cè­se relè­ve donc de sa com­pé­ten­ce exclu­si­ve, en sui­vant les orien­ta­tions du Siège apo­sto­li­que.

Art. 3 : l’évêque, dans les dio­cè­ses duquel l’on trou­ve à ce jour la pré­sen­ce d’un ou plu­sieurs grou­pes qui célè­brent selon le Missel anté­rieur à la réfor­me de 1970 :

§ 1. s’assurera que ces grou­pes ne rejet­tent pas la vali­di­té et la légi­ti­mi­té de la réfor­me litur­gi­que, des décla­ra­tion de Vatican II et du Magistère des papes ;

§ 2. indi­que­ra un ou plu­sieurs lieux où les fidè­les appar­te­nant à ces grou­pes pour­ront se réu­nir pour la célé­bra­tion eucha­ri­sti­que (mais pas dans les égli­ses parois­sia­les et sans éri­ger de nou­vel­les parois­ses per­son­nel­les) ;

§ 3. éta­bli­ra dans le lieu indi­qué les jours aux­quels sont auto­ri­sées les célé­bra­tions eucha­ri­sti­ques avec l’usage du Missel Romain pro­mul­gué par saint Jean XXIII en 1962. Au cours de ces célé­bra­tions, les lec­tu­res devront être pro­cla­mées en lan­gue ver­na­cu­lai­re, con­for­mé­ment aux tra­duc­tions de la sain­te Écriture pour la litur­gie, approu­vées par les Conférences épi­sco­pa­les respec­ti­ves ;

§ 4. nom­me­ra un prê­tre qui, en tant que délé­gué de l’évêque, sera char­gé des célé­bra­tions et du soin pasto­ral de ces grou­pes de fidè­les. Le prê­tre devra être idoi­ne à une tel­le char­ge, devra être com­pé­tent en ce qui con­cer­ne l’utilisation du Missale Romanum anté­rieur à la réfor­me de 1970, devra avoir une con­nais­san­ce de la lan­gue lati­ne qui lui per­met­te de com­pren­dre plei­ne­ment les rubri­ques et les tex­tes litur­gi­ques, devra être ani­mé d’une vive cha­ri­té pasto­ra­le et d’un sens de la com­mu­nion ecclé­sia­le. Il est en fait néces­sai­re que le prê­tre respon­sa­ble ait à cœur non seu­le­ment la célé­bra­tion digne de la litur­gie mais aus­si le soin pasto­ral et spi­ri­tuel des fidè­les.

§ 5. pro­cè­de­ra, dans les parois­ses per­son­nel­les cano­ni­que­ment éri­gées pour ces fidè­les, à une véri­fi­ca­tion appro­priée de leur uti­li­té effec­ti­ve pour la crois­san­ce spi­ri­tuel­le et éva­lue­ra s’il con­vient de les main­te­nir ou pas.

§ 6. pren­dra soin de ne pas auto­ri­ser la con­sti­tu­tion de nou­veaux grou­pes.

Art. 4. Les prê­tres ordon­nés après la publi­ca­tion du pré­sent motu pro­prio qui ont l’intention de célé­brer avec le Missale Romanum de 1962 devront en outre adres­ser une deman­de for­mel­le à l’évêque dio­cé­sain qui con­sul­te­ra le Siège apo­sto­li­que avant de don­ner l’autorisation.

Art. 5. Les prê­tres qui célè­brent déjà selon le Missale Romanum de 1962 devront deman­der à leur évê­que dio­cé­sain l’autorisation pour con­ti­nuer à béné­fi­cier de cet­te facul­té.

Art. 6. Les insti­tu­ts de vie con­sa­crée et les Sociétés de vie apo­sto­li­que, autre­fois éri­gées par la Commission pon­ti­fi­ca­le Ecclesia Dei pas­sent sous la com­pé­ten­ce de la Congrégation pour les Instituts de vie con­sa­crée et les socié­tés de vie apo­sto­li­que.

Art. 7. La Congrégation pour le Culte divin et la disci­pli­ne des sacre­men­ts ain­si que la Congrégation pour les Instituts de vie con­sa­crée et les socié­tés de vie apo­sto­li­que exer­ce­ront, pour les matiè­res qui relè­vent de leur com­pé­ten­ce, l’autorité du Saint-Siège en veil­lant au respect de ces dispo­si­tions.

Art. 8. Les nor­mes, instruc­tions, auto­ri­sa­tions et habi­tu­des anté­rieu­res qui ne sera­ient pas con­for­mes avec ce qui est éta­bli dans le pré­sent motu pro­prio sont abro­gées.

J’ordonne que tout cela qui est sti­pu­lé dans cet­te let­tre apo­sto­li­que en for­me de motu pro­prio soit obser­vé dans tou­tes ses par­ties, nonob­stant tou­te cho­se con­trai­re, même digne de men­tion par­ti­cu­liè­re, et j’établis qu’elle soit pro­mul­guée à tra­vers la publi­ca­tion dans la quo­ti­dien « L’Osservatore Romano », entrant immé­dia­te­ment en vigueur et qu’elle soit ensui­te publiée dans le Commentaire offi­ciel du Saint-Siège, les Acta Apostolicae Sedis.

Donné à Rome, à Saint-Jean-du-Latran, le 16 juil­let 2021 en la mémoi­re litur­gi­que de Notre-Dame du Mont-Carmel, en la neu­viè­me année de notre pon­ti­fi­cat.

FRANÇOIS.


POST-SCRIPTUM  :

Suite à la publi­ca­tion par le Pape François de Traditionis custo­des, la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements a reçu plu­sieurs deman­des d’éclaircissement sur son appli­ca­tion cor­rec­te. Certaines que­stions ont été sou­le­vées de plu­sieurs côtés et avec une fré­quen­ce accrue : c’est pour­quoi, après les avoir soi­gneu­se­ment exa­mi­nées, en avoir infor­mé le Saint-Père et avoir reçu son assen­ti­ment, les répon­ses aux que­stions les plus récur­ren­tes sont main­te­nant publiées :

> Responsa ad dubia sur cer­tai­nes dispo­si­tions de la Lettre Apostolique en for­me di « Motu Proprio » Traditionis custo­des (4 décem­bre 2021) (vatican.va)

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