Lobby gay et scandales au Vatican. Une conférence de Marco Tosatti

Le 13 juil­let der­nier s’e­st tenu à Bergame une con­fé­ren­ce sur le thè­me des scan­da­les à répé­ti­tion qui affli­gent actuel­le­ment l’Église catho­li­que.  L’un des inter­ve­nan­ts n’é­tait autre que le vati­ca­ni­ste Marco Tosatti, ancien jour­na­li­ste au quo­ti­dien La Stampa et auteur de plu­sieurs livres sur l’Église dont le der­nier, “Viganò e il Papa”, est sor­ti de pres­se récem­ment.  Il abor­de sans tabou et avec luci­di­té un sujet qui déran­ge : l’é­ten­due de l’ho­mo­se­xua­li­té au Vatican et la que­stion de l’e­xi­sten­ce pré­su­mée de réseaux d’in­fluen­ce.  Nous repro­dui­sons ici avec son auto­ri­sa­tion la trans­crip­tion fra­nçai­se de son expo­sé.

L’Église catho­li­que tra­ver­se une cri­se pro­fon­de. Les abus sexuels en for­ment une par­tie dra­ma­ti­que et visi­ble mais cet­te cri­se com­prend d’autres aspec­ts qu’il est très inté­res­sant d’examiner les uns après les autres.

Il y a tou­jours eu des abus sexuels et il y en aura tou­jours.

Mais atten­tion : nous voi­ci déjà face au pre­mier pro­blè­me et au pre­mier piè­ge.

Si vous lisez les titres des jour­naux, et mêmes les docu­men­ts de l’Église, on par­le de pédo­phi­lie ou d’abus sur mineurs.

Pourquoi par­ler de piè­ge ? Parce que selon la thè­se du pro­fes­seur Davide Cito, un prê­tre qui ensei­gne à l’Université pon­ti­fi­ca­le de la Sainte-Croix et qui col­la­bo­re avec la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, voi­ci les cho­ses se pré­sen­tent :

Société civi­le : 90% des abus sur des enfan­ts, sou­vent de l’autre sexe (famil­le, éco­le, sport). 10% des abus sur des mineurs du même sexe.

Église : 90% des abus sur des mineurs du même sexe (garçons), en géné­ral âgés de 14 à 18 ans. 10% de cas de pédo­phi­lie à pro­pre­ment par­ler.

Donc, la pédo­phi­lie n’a pas grand-chose à y voir.

Il sem­ble évi­dent – com­me d’autres sour­ces l’ont con­fir­mé : le prof. Dariusz Oko, prê­tre et pro­fes­seur à l’Université de Carcovie et le car­di­nal Gerhard Müller, ancien pré­fet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et d’autres enco­re – qu’il s’agit sur­tout d’un pro­blè­me d’homosexualité dans le cler­gé.

Et même le rap­port du John Jay College pré­sen­te des chif­fres qui vont dans le même sens : 80% des prê­tres con­dam­nés pour abus aux États-Unis éta­ient homo­se­xuels. Curieusement, la rédac­tri­ce du rap­port – natu­rel­le­ment effrayée par l’idée d’affirmer que le Roi est nu – affir­me que l’homosexualité n’a rien à voir avec les abus. Extraordinaire, non ?

Rien de plus nor­mal. Le poli­ti­que­ment cor­rect refu­se que cet­te véri­té, pour­tant évi­den­te, ne soit dite.

Voilà pour ce qui con­cer­ne les grands moyens de com­mu­ni­ca­tion de mas­se com­me la télé­vi­sion qui sont, sauf excep­tion rare, des instru­men­ts inféo­dés à la pen­sée uni­que domi­nan­te.

Et en ce qui con­cer­ne l’Église ? On pour­rait quand même s’attendre à ce que les cho­ses soient sub­stan­tiel­le­ment dif­fé­ren­tes. Eh bien ! détrompez-vous.

La cri­se des abus sexuels – dans sa pha­se média­ti­que actuel­le – a com­men­cé début 2018, avec le voya­ge au Chili du Pape régnant et les pro­te­sta­tions con­tre la nomi­na­tion à la tête du dio­cè­se d’Osorno de Mgr Juan Barros, le fils spi­ri­tuel de Fernando Karadima, un abu­seur en série. À par­tir de ce moment et ensui­te avec la cri­se de McCarrick, le témoi­gna­ge de Mgr Viganò, les autres scan­da­les à répé­ti­tion aux États-Unis, en Allemagne, dans les pays du Bénélux et en Italie, le Pape régnant n’a jamais, pas même une fois, pro­non­cé le mot « homo­se­xua­li­té » en lien avec les abus.

D’autres l’ont fait : Müller, Viganò, plu­sieurs évê­ques aux États-Unis, cer­tains car­di­naux (Burke, si j’ai bon­ne mémoi­re, et Brandmüller entre autres). Mais le Pape, jamais.

Par con­tre, Benoît XVI l’a fait. Quand, à l’automne 2018, on a annon­cé un som­met de tou­tes les Conférences épi­sco­pa­les mon­dia­les qui devait se tenir à Rome en février 2019, Joseph Ratzinger a com­men­cé à rédi­ger sa con­tri­bu­tion sur le sujet. Celle-ci aurait pu (et aurait peut-être dû) être remi­se aux évê­ques par­ti­ci­pant au som­met. Celle-ci men­tion­nait expli­ci­te­ment par­mi les cau­ses de la cri­se le cli­mat d’homosexualité qui régnait dans de nom­breux sémi­nai­res. Il l’a tran­smi­se au Pape Bergoglio, via la Secrétairerie d’État, et les cho­ses en sont restées là. Quelques mois plus tard, le docu­ment a été publié par un petit jour­nal bava­rois et repris dans le mon­de entier.

Mais de la part du pape régnant, pas un mot.

C’est même tout le con­trai­re. Nous avons vu que la per­son­ne qui a été appe­lée à la manœu­vre pour pré­pa­rer le som­met, c’est le car­di­nal arche­vê­que de Chicago, Blase Cupich, un hom­me du réseau de McCarrick, à l’instar de plu­sieurs autres nomi­na­tions du Pape Bergoglio aux USA.

Le Pape régnant et les abus

À l’époque où il était l’archevêque de Buenos Aires, Jorge Mario Bergoglio ne sem­ble pas s’être distin­gué par une gran­de sen­si­bi­li­té envers le pro­blè­me des abus. Bien au con­trai­re. La mère d’un jeu­ne garçon abu­sé par un prê­tre – qui a d’ailleurs trou­vé refu­ge dans un appar­te­ment de la Curie – n’a jamais réus­si à le ren­con­trer, mal­gré ses deman­des répé­tées, et elle en a témoi­gné avec amer­tu­me tout de sui­te après son élec­tion.

Un prê­tre con­dam­né par le tri­bu­nal à plu­sieurs années de pri­son, le P. Grassi, a décla­ré pen­dant l’audience que « Bergoglio ne m’a jamais lâché la main ». Mais il a fait bien plus. Quand il était pré­si­dent de la Conférence épi­sco­pa­le, Mgr Bergoglio a fait pré­pa­rer un épais mémoi­re en deux volu­mes à déchar­ge du P. Grassi afin d’influencer le pro­cès en appel qui s’est fina­le­ment con­clu par la con­dam­na­tion du prê­tre abu­seur. Une histoi­re plu­tôt embar­ras­san­te : à un point tel que dans une inter­view récen­te pour un docu­men­tai­re fra­nçais, le Pape a dit – en men­tant – qu’il n’avait jamais rien fait de ce gen­re.

En outre, de nom­breux sur­vi­van­ts des abus per­pé­trés en Argentine lui ont écrit à plu­sieurs repri­ses sans jamais rece­voir la moin­dre répon­se.

L’an der­nier, il a atta­qué les vic­ti­mes d’abus au Chili qui lui deman­da­ient la démis­sion de Mgr Barros et, men­tant une nou­vel­le fois, il a pré­ten­du n’avoir jamais reçu de deman­de de leur part pour le ren­con­trer. Bref, à pre­miè­re vue, la sen­si­bi­li­té du Pape envers ce gen­re de pro­blè­me sem­ble pour le moins limi­tée. Et cela nous inci­te à nous pen­cher sur qui éta­ient – et sont enco­re – ses amis, ceux qui ont pré­pa­ré et appuyé son élec­tion. J’invite les per­son­nes inté­res­sées qui sou­hai­tent appro­fon­dir le sujet à con­sul­ter bishop­sac­coun­ta­bi­li­ty, un site spé­cia­li­sé et très bien infor­mé.

Les amis du Pape

Dans ce domai­ne, l’histoire est enco­re plus embar­ras­san­te. Faisons la liste des prin­ci­paux car­di­naux ayant joué un rôle impor­tant en sa faveur pen­dant les deux con­cla­ves, celui de 2005 et celui de 2013, sur­tout ceux qui ava­ient déjà œuvré aupa­ra­vant pour pro­mou­voir sa can­di­da­tu­re ; des per­son­nes qui ava­ient de sérieux pro­blè­mes en rap­port avec des affai­res d’abus sexuels.

Danneels

Le car­di­nal bel­ge Danneels, respon­sa­ble d’avoir cou­vert un évê­que qui avait abu­sé de son pro­pre neveu, a décla­ré avoir fait par­tie de la « mafia de Saint-Gall » qui a tra­vail­lé acti­ve­ment pour fai­re éli­re le Pape Bergoglio. Le car­di­nal Danneels est appa­ru aux côtés du Pape dans la Loggia de Saint-Pierre après l’élection. En outre, le Pape l’a invi­té à par­ti­ci­per aux deux syno­des sur la famil­le !

McCarrick

Aujourd’hui, Theodore McCarrick n’est plus car­di­nal, ni même prê­tre. À la veil­le du som­met sur la pro­tec­tion des mineurs au Vatican, une pro­cé­du­re admi­ni­stra­ti­ve a con­dam­né McCarrick, qui a pré­sen­té au Pape un recours qui a été reje­té. Mais McCarrick était un hom­me puis­sant et influent. McCarrick a décla­ré, tout com­me le car­di­nal Danneels, au cours d’une con­fé­ren­ce enre­gi­strée à la Villanova University, avoir œuvré pour fai­re éli­re le Pape François. Ce der­nier l’a récom­pen­sé en levant dans les fai­ts les sanc­tions que Benoît XVI lui avait impo­sées et qu’un grand ami de McCarrick, le car­di­nal Wuerl, n’avait pas fait respec­ter, alors que c’était son devoir (c’est l’archevêque du lieu où le pré­lat rési­de qui en est respon­sa­ble). Et ce n’est pas tout. Le pape Bergoglio a fait appel à McCarrick, en tant qu’expert des affai­res amé­ri­cai­nes, com­me con­seil­ler per­son­nel pour les nomi­na­tions épi­sco­pa­les et car­di­na­li­ces. Et il l’a fait voya­ger en tant que son repré­sen­tant offi­cieux à Cuba, en Iran, en Chine, en Arménie et en Terre Sainte. Il est vrai qu’il l’a chas­sé du col­lè­ge des car­di­naux mais il ne l’a fait qu’après que la justi­ce laï­que l’ait accu­sé d’abus sur mineur. Les abus sur des sémi­na­ri­stes et sur de jeu­nes prê­tres dont il était accu­sé depuis plu­sieurs années et qui éta­ient avé­rés n’étaient pas suf­fi­san­ts pour le Pape. Le Pape n’a d’ailleurs pas enco­re four­ni de répon­se – sauf en disant ne pas se sou­ve­nir – aux accu­sa­tions per­son­nel­les de com­pli­ci­té por­tées par l’archevêque Viganò. Et entre­temps, un livre rédi­gé par Frédéric Martel, un acti­vi­ste homo­se­xuel fra­nçais qui a vécu au Vatican et qui a été aidé et con­seil­lé par des per­son­nes de l’entourage du Pape, affir­me : « Quand le Pape a reje­té les accu­sa­tions, son entou­ra­ge m’a dit que François ‘avait été dès le départ infor­mé par Viganò que le car­di­nal McCarrick avait eu des rela­tions homo­se­xuel­les avec des sémi­na­ri­stes majeurs, ce qui à ses yeux n’était pas suf­fi­sant pour le con­dam­ner’ ».

Mahony

Ex-cardinal de Los Angeles, respon­sa­ble d’avoir mal géré les abus et con­dam­né à une vie de priè­re et reti­ré de tou­te vie publi­que. Mahony, qui est un pro­gres­si­ste, est aus­si l’un des grands élec­teurs du car­di­nal Bergoglio. Ce der­nier en a fait son repré­sen­tant à une impor­tan­te céré­mo­nie à Scanton. Face à la réac­tion indi­gnée des catho­li­ques amé­ri­cains, Mahony n’y est fina­le­ment pas allé. Mais aujourd’hui, Mahony figu­re dans la liste des ora­teurs à un impor­tant col­lo­que à Los Angeles. Et les pro­te­sta­tions ont repris.

Murphy O’Connor

Archevêque et car­di­nal de Westminster. Décédé il y a quel­ques mois. Il fai­sait lui aus­si par­tie de la mafia de Saint-Gall et a œuvré pour fai­re éli­re le Pape. Il a admis ses erreurs dans la gestion d’une affai­re con­cer­nant un prê­tre abu­seur en série qui a fina­le­ment été con­dam­né par la justi­ce civi­le. Le Pape a impo­sé l’arrêt d’un pro­cès à son encon­tre auprès de la Congrégation pour la doc­tri­ne de la foi. Ce pro­cès avait été ouvert à la sui­te de la plain­te d’une dame, vic­ti­me recon­nue d’un prê­tre abu­seur con­dam­né à la pri­son par la justi­ce bri­tan­ni­que. Cette dame accu­sait Murphy O’Connor. Pendant des années, on a tout fait pour entra­ver cet­te plain­te jusqu’à ce qu’elle finis­se par arri­ver à Rome et que le Pape, usant de son auto­ri­té, ne blo­que tout. Un acte publi­que­ment cri­ti­qué par le car­di­nal Müller.

Errazuriz Ossa

Cardinal Chilien, c’est l’un des grands élec­teurs de Jorge Mario Bergoglio au Conclave. Jusqu’à il y a quel­ques mois, il fai­sait enco­re par­tie du C9, le grou­pe de car­di­naux du mon­de entier créé par le Pape pour réflé­chir à la réfor­me de la Curie et de l’Église. Une enquê­te de la magi­stra­tu­re chi­lien­ne a mis en lumiè­re ses respon­sa­bi­li­tés pour avoir cou­vert des prê­tres respon­sa­bles d’abus.

Donald Wuerl

Archevêque de Washington il y a quel­ques mois enco­re, c’est l’un des hom­mes du grou­pe de McCarrick. Il était cen­sé veil­ler à l’application des sanc­tions infli­gées au car­di­nal par le pape Benoît XVI mais il ne l’a pas fait. C’est l’un des hom­mes de con­fian­ce du Pape actuel. Il a été l’archevêque de Washington pen­dant trois ans après avoir pas­sé la bar­re des 75 ans. Dans un rap­port, le Grand Jury de Pennsylvanie l’a accu­sé d’avoir cou­vert McCarrick après les sanc­tions impo­sées par le pape Benoît. Une péti­tion lan­cée par des fidè­les pour exi­ger sa démis­sion a récol­té des mil­liers de signa­tu­res et l’archevêque a fini par démis­sion­ner, même si le Pape s’est répan­du en élo­ges à son égard dans sa let­tre d’adieu. Ce qui n’a pas man­qué d’aller jusqu’à susci­ter la cri­ti­que du New York Times…

Maradiaga

C’est l’un des hom­mes les plus écou­tés par le Pape. Avec McCarrick, il avait sug­gé­ré la nomi­na­tion de Mgr Cupich à Chicago, con­tre l’avis de la Conférence épi­sco­pa­le et du Nonce. Il y a quel­ques mois, il a été accu­sé de scan­da­les finan­ciers et entres autre d’avoir reçu 35.000 euros par mois de l’Université Catholique du Honduras. Mais un scan­da­le beau­coup plus gra­ve a frap­pé son dio­cè­se. Le car­di­nal Maradiaga voya­ge beau­coup et il a tou­jours con­fié son dio­cè­se à un évê­que auxi­liai­re, Pineda Fasquelle. Or Mgr Pineda a été con­traint de démis­sion­ner après que de nom­breux sémi­na­ri­stes aient rédi­gé une let­tre l’accusant d’agressions homo­se­xuel­les. Mais il sem­ble­rait qu’il fas­se enco­re la pluie et le beau temps à Tegucigalpa, sous la pro­tec­tion du car­di­nal Maradiaga et aucu­ne pro­cé­du­re ecclé­sia­sti­que n’ait enco­re été ouver­te con­tre lui. En par­lant des accu­sa­tions con­tre McCarrick, le car­di­nal Maradiaga a décla­ré qu’il ne s’agissait que d’« affai­res pri­vées » et qu’il n’était pas juste de fai­re autant de scan­da­le pour une « que­stion admi­ni­stra­ti­ve ». Rappelons que McCarrick a sexuel­le­ment abu­sé de sémi­na­ri­stes et de jeu­nes prê­tres pen­dant des années.

Coccopalmerio

En Italie, le car­di­nal Coccopalmerio est l’un des hom­mes de con­fian­ce du Pape. Son secré­tai­re a été arrê­té pen­dant une orgie homo­se­xuel­le dans un appar­te­ment du palais de la Congrégation pour la doc­tri­ne de la foi que le car­di­nal avait réus­si à lui fai­re obte­nir. Il sem­ble­rait que ce soit éga­le­ment le car­di­nal Coccopalmerio qui ait con­vain­cu le Pape de réha­bi­li­ter un prê­tre ita­lien, le P. Inzoli, qui a ensui­te été con­dam­né par le justi­ce ita­lien­ne pour abus sexuels. Le Pape a deman­dé con­seil au car­di­nal Coccopalmerio sur la maniè­re de punir l’archevêque Viganò.

Zanchetta

Nous som­mes ici pro­ba­ble­ment face à une nou­vel­le affai­re McCarrick, avec une impli­ca­tion du Pape enco­re plus gran­de. Gustavo Zanchetta était évê­que d’Orán, en Argentine. EN 2017, il aban­don­ne son dio­cè­se à l’improviste, en pré­tex­tant des motifs de san­té, et il dispa­raît pen­dant plu­sieurs mois. Le Pape le fait venir au Vatican et crée pour lui une fonc­tion sur mesu­re, qui n’a jamais exi­sté aupa­ra­vant, d’assesseur à l’APSA (l’Administration du Patrimoine du Siège Apostolique), le coffre-fort de l’Église. Mais entre­temps, on apprend que Mgr Zanchetta avait abu­sé de sémi­na­ri­stes et que trois prê­tres, dont le Vicaire géné­ral du dio­cè­se, l’ont dénon­cé au Vatican en 2015 déjà. Mgr Zanchetta vit tou­jours à Sainte Marthe. La défen­se offi­ciel­le du Vatican con­si­ste à pré­ten­dre que jusqu’à il y a quel­ques mois, le Pape ne savait rien des exac­tions de Mgr Zanchetta alors qu’il était pour­tant – selon ce qu’on dit en Argentine – son « père spi­ri­tuel ». À pré­sent, la justi­ce argen­ti­ne a ouvert une enquê­te con­tre Mgr Zanchetta qui devra com­pa­raî­tre devant un tri­bu­nal. Une situa­tion très embar­ras­san­te pour le Pape qui se défend en pré­ten­dant que les expli­ca­tions de Mgr Zanchetta ava­ient été très con­vain­can­tes.

Peña Parra

Mais dans le sil­la­ge inter­mi­na­ble des per­son­na­ges pro­blé­ma­ti­ques qui sem­blent accom­pa­gner François depuis l’époque de Buenos Aires jusqu’à nos jours, il en est eu qui sem­ble tout par­ti­cu­liè­re­ment poser pro­blè­me. Tout d’abord par­ce qu’il n’appartient pas à un pas­sé plus ou moins loin­tain mais très récent. Et ensui­te par­ce qu’il s’agit du Substitut de la Secrétairerie d’État, c’est-à-dire du numé­ro 3 dans la hié­rar­chie du Vatican.

Selon l’archevêque Viagnò, le Pape aurait choi­si d’ignorer un effroya­ble dos­sier envoyé par un grou­pe de fidè­les de Maracaibo inti­tu­lé « Quién es ver­da­de­ra­men­te Monseñor Edgar Robinson Peña Parra, Nuevo Sustituto de la Secretarîa de Estado del Vaticano? ». Le dos­sier est signé par le Dr. Enrique W. Lagunillas Machado, au nom du « Grupo de Laicos de la Arquidiócesis de Maracaibo por una Iglesia y un Clero según el Corazón de Cristo ».

Ces fidè­les accu­sent Mgr Peña Parra d’une ter­ri­ble immo­ra­li­té en décri­vant dans le détail ses cri­mes pré­su­més. Ce scan­da­le pour­rait bien sur­pas­ser celui de McCarrick et on ne devrait pas per­met­tre qu’il soit cou­vert par le silen­ce.

Certains fai­ts ont été publiés par les médias, en par­ti­cu­lier dans l’hebdomadaire ita­lien l’Espresso, et ensui­te sur LifeSiteNews et sur le blog Stilum Curiae. Mais Mgr Viganò, qui dans les années 2000 tra­vail­lait à la Secrétairerie d’État au ser­vi­ce du Délégué pour les repré­sen­ta­tions pon­ti­fi­ca­les, en a appor­té la con­fir­ma­tion ain­si que d’autres élé­men­ts.

En jan­vier 2000, un jour­na­li­ste de Maracaibo, Gastón Guisandes López, a por­té de gra­ves accu­sa­tions con­tre cer­tains prê­tres du dio­cè­se de Maracaibo, dont Mgr Peña Parra, y com­pris d’abus sexuels sur mineurs et d’autres actes poten­tiel­le­ment cri­mi­nels. En 2001, Gastón Guisandes López deman­de par deux fois à être reçu par le non­ce apo­sto­li­que (l’ambassadeur du Pape) au Venezuela, l’archevêque André Dupuy, pour lui en par­ler, mais l’archevêque refu­se de le rece­voir, sans expli­ca­tion. Toutefois, le Nonce envo­ie un rap­port à la Secrétairerie d’État en racon­tant que le jour­na­li­ste avait accu­sé Mgr Peña Parra de deux cri­mes très gra­ves, en décri­vant les cir­con­stan­ces. Premièrement, Edgar Peña Parra avait été accu­sé d’avoir séduit, le 24 sep­tem­bre 1990, deux sémi­na­ri­stes mineurs de la parois­se de San Pablo, qui éta­ient cen­sés entrer au Grand Séminaire de Maracaibo la même année. On dit que ces fai­ts se sera­ient dérou­lés dans l’église de Nuestra Señora del Rosario dont le curé était le révé­rend José Severeyn. Le Rev. Severeyn fut ensui­te ren­voyé de cet­te parois­se par l’archevêque de l’époque, Mgr Roa Pérez. L’affaire a été dénon­cée à la poli­ce par les paren­ts des deux jeu­nes et a été trai­tée par celui qui était direc­teur du Grand Séminaire à l’époque, le Rev. Enrique Pérez, ain­si que par le direc­teur spi­ri­tuel de l’époque, le Rev. Emilio Melchor. Interrogé par la Secrétairerie d’État, le Rev. Pérez a con­fir­mé par écrit l’épisode du 24 sep­tem­bre 1990. Mgr Viganò a décla­ré avoir vu ces docu­men­ts de ses pro­pres yeux.

En second lieu, Mgr Edgar Peña Parra est sou­pçon­né avoir été impli­qué, avec d’autres, dans un fait divers qui n’a jamais été com­plè­te­ment éclair­ci : la mort de deux per­son­nes, un méde­cin et un cer­tain Jairo Pérez, sur­ve­nue en août 1992 sur l’île de San Carlos au lar­ge de Maracaibo. Ils ont été tués une déchar­ge élec­tri­que et on n’est pas cer­tain que leurs morts soient vrai­ment acci­den­tel­les. La même accu­sa­tion se retrou­ve éga­le­ment dans le dos­sier susmen­tion­né envoyé par un grou­pe de laïcs de Maracaibo, avec le détail sup­plé­men­tai­re que les deux cada­vres ont été décou­verts nus, avec la pre­u­ve de rap­ports homo­se­xuels maca­bres. Ces accu­sa­tions sont pour le moins extrê­me­ment gra­ves.

Malgré cela, non seu­le­ment Mgr Peña Parra n’a pas été con­traint d’en ren­dre comp­te mais on l’a éga­le­ment auto­ri­sé à con­ti­nuer à tra­vail­ler au ser­vi­ce diplo­ma­ti­que du Saint-Siège.

Ces deux accu­sa­tions ont été signa­lées à la Secrétairerie d’État en 2002 par le Nonce apo­sto­li­que au Vénézuela de l’époque, l’archevêque André Dupuy. Mgr Viganò affir­me avoir vu de ses yeux tous les docu­men­ts en que­stion qui, s’ils n’ont pas été détrui­ts, se trou­vent tou­jours aus­si bien dans les archi­ves du per­son­nel diplo­ma­ti­que de la secré­tai­re­rie d’État que dans les archi­ves de la non­cia­tu­re apo­sto­li­que au Venezuela où les arche­vê­ques sui­van­ts ont ser­vi com­me non­ces : Giacinto Berloco, de 2005 à 2009; Pietro Parolin, de 2009 à 2013 et Aldo Giordano, de 2013 ad aujourd’hui. Tous ava­ient accès aux docu­men­ts qui détail­la­ient ces accu­sa­tions con­tre le futur Substitut, tout com­me les car­di­naux secré­tai­re d’État Sodano, Bertone et Parolin ain­si que les sub­sti­tu­ts Filoni et Becciu.

Selon Mgr Viganò, le com­por­te­ment du car­di­nal Parolin sem­ble par­ti­cu­liè­re­ment gra­ve : en tant que Secrétaire d’État, il ne s’est pas oppo­sé à la récen­te nomi­na­tion de Mgr Peña Parra com­me sub­sti­tut, fai­sant de lui son plus pro­che col­la­bo­ra­teur. Mais il y a plus : en jan­vier 2011, alors qu’il était non­ce apo­sto­li­que à Caracas, Parolin ne s’est pas oppo­sé à la nomi­na­tion de Peña Parra com­me arche­vê­que et non­ce apo­sto­li­que au Pakistan. Avant de con­fier des char­ges aus­si impor­tan­tes, une enquê­te rigou­reu­se est menée pour s’assurer de l’idonéité du can­di­dat ; il est donc cer­tain que les accu­sa­tions en que­stion ont été por­tées à l’attention du car­di­nal Parolin. Si la respon­sa­bi­li­té du car­di­nal Parolin est gra­ve, cel­le du Pape François l’est enco­re davan­ta­ge pour avoir nom­mé à une fonc­tion aus­si impor­tan­te pour l’Église un hom­me accu­sé, ou à tout le moins suspec­té, de cri­mes aus­si hor­ri­bles, sans avoir exi­gé une enquê­te ouver­te et appro­fon­die. Il y a quel­ques semai­nes, les évê­ques du Venezuela ont publié une décla­ra­tion de sou­tien au sub­sti­tut en affir­mant que les accu­sa­tions n’étaient pas vra­ies. Mais ils ne répon­dent pas en détail sur les accu­sa­tions en que­stion et enco­re moins sur d’éventuelles enquê­tes ou docu­men­ts.

Il y a un autre aspect scan­da­leux à cet­te histoi­re. Mgr Peña Parra était étroi­te­ment lié au Honduras, plus pré­ci­sé­ment au car­di­nal Maradiaga et à l’évêque Juan José Pineda Fasquelle. Entre 2003 et 2007, Mgr Peña Parra a tra­vail­lé à la non­cia­tu­re de Tegucigalpa et pen­dant qu’il était là, il était très pro­che de Juan José Pineda qui a été ordon­né évê­que auxi­liai­re de Tegucigalpa en 2005, deve­nant le bras droit du car­di­nal Maradiaga. Nous avons déjà évo­qué Juan José Pineda et son incroya­ble affai­re il y a quel­ques instan­ts. Le Pape François n’a pas com­mu­ni­qué les résul­ta­ts du rap­port que le Visiteur apo­sto­li­que, l’évêque argen­tin Alcides Casaretto, lui a remis direc­te­ment en mains pro­pres.

Comment inter­pré­ter la déci­sion du Pape François de ne pas s’exprimer, d’esquiver et de mini­mi­ser la moin­dre que­stion sur le sujet sinon com­me une cou­ver­tu­re des fai­ts et la pro­tec­tion d’un réseau homo­se­xuel ? Un tel com­por­te­ment auto­ri­se à pen­ser que plu­tôt que de dili­gen­ter une enquê­te trans­pa­ren­te et sérieu­se sur les per­son­nes incri­mi­nées, le Pape lais­se tou­te l’Église souf­frir aux mains d’un réseau de pré­la­ts homo­se­xuels de car­riè­re.

Le lobby gay

Le témoi­gna­ge de Mgr Viganò, sur lequel nous ne nous éten­drons pas, affir­me qu’il exi­ste dans l’Église un lob­by de pré­lat homo­se­xuels qui sont éga­le­ment favo­ri­sés par des pré­la­ts pro-gays. D’autres affir­ment que, dans l’Église, l’homosexualité n’a jamais été aus­si répan­due qu’aujourd’hui. Le prof. Oko, d’une uni­ver­si­té polo­nai­se, affir­me qu’entre 30% et 40% des prê­tres amé­ri­cains ont des ten­dan­ces homo­se­xuel­les. Et il en va de même, sinon davan­ta­ge, pour les évê­ques. Plusieurs évê­ques amé­ri­cains ont par­lé d’« homo­se­xua­li­té dif­fu­se » dans l’Église.

Personnellement, de nom­breu­ses per­son­nes me par­lent de situa­tions ana­lo­gues en Italie, dans des sémi­nai­res et dans des ordres reli­gieux.

Je n’ai pas enco­re dres­sé d’inventaire mais si ce que m’ont rap­por­té plu­sieurs sour­ces de maniè­re indé­pen­dan­te est vrai, et je le crois, il y a une for­te pré­sen­ce d’homosexuels au Vatican, même dans l’entourage pro­che du Pape. Et le livre de Frédéric Martel, même s’il ne faut pas lui accor­der trop de cré­dit, affir­me qu’il y a une for­te pré­sen­ce homo­se­xuel­le au Vatican. Il est quand même extraor­di­nai­re que Martel, un écri­vain et acti­vi­ste homo­se­xuel, ait pu vivre une semai­ne par mois au Vatican, héber­gé et aidé par des pré­la­ts. Dont Mgr Ricca, le direc­teur de Sainte-Marthe, que le Pape a nom­mé pré­lat de l’IOR, la ban­que du Vatican. Mgr Ricca, qui est un diplo­ma­te, a vu sa car­riè­re abré­gée par ses fra­sques homo­se­xuel­les qui ont fait scan­da­le en Amérique du Sud. Et c’est un hom­me de con­fian­ce du Pape.

Le véri­ta­ble pro­blè­me, en fait, c’est que beau­coup pen­sent qu’une opé­ra­tion visant à légi­ti­mer les rap­ports homo­se­xuels dans l’Église catho­li­que est en cours.

Plusieurs élé­men­ts per­met­tent de ren­dre cet­te thè­se plau­si­ble.

Le pre­mier élé­ment c’est la célè­bre phra­se « qui suis-je pour juger » pro­non­cée par le Pape.

Le second élé­ment c’est que jamais depuis que les scan­da­les liés aux abus sexuels ont écla­té au Chili, aux États-Unis, en Allemagne, au Honduras et en Argentine, le Pape n’a pro­non­cé le mot homo­se­xua­li­té et qu’il n’a jamais fait le lien entre les abus et l’homosexualité. Il a en revan­che poin­té du doigt le « clé­ri­ca­li­sme », même dans l’affaire McCarrick.

De nom­breux évê­ques et obser­va­teurs laïcs con­si­dè­rent pour­tant qu’il y a un lien direct entre homo­se­xua­li­té et abus. L’étude la plus récen­te, cel­le du Ruth Institute, ne dit pas autre cho­se. Tout com­me d’autres experts, com­me nous l’avons dit au début.

Un troi­siè­me élé­ment : le P. James Martin SJ, un jésui­te acti­vi­ste pour les « droi­ts » LGBT a été nom­mé con­sul­teur pour la Communication du Vatican. En outre, il a été invi­té à pren­dre la paro­le à la ren­con­tre mon­dia­le des famil­les à Dublin. Son pro­tec­teur au Vatican, le car­di­nal Kevin Farrell, étroi­te­ment lié à McCarrick, a été nom­mé par le Pape Camerlingue de la Sainte Église Romaine, après la mort du car­di­nal Jean-Louis Tauran.

Quatrième élé­ment. Dans l’Instrumentum Laboris du Synode sur les Jeunes, l’acronyme LGBT a été insé­ré sans que per­son­ne n’en ait par­lé au cours de la pha­se pré­pa­ra­toi­re. L’opposition de nom­breux évê­ques a empê­ché qu’il ne se retrou­ve dans le docu­ment final qui uti­li­se quant à lui l’expression d’« orien­ta­tion sexuel­le » qui fait par­tie du voca­bu­lai­re LGBT.

Cinquième élé­ment. Ces der­niè­res semai­nes, on a assi­sté à des gay pri­des pra­ti­que­ment par­tout. Dans cer­tains cas, com­me à New York dans l’église de San François, on a célé­bré des mes­ses « pre-pride ». Et le même père jésui­te James Martin a affir­mé que le Pape avait nom­mé beau­coup d’évêques et de car­di­naux pro-LGBT… sans être con­tre­dit, natu­rel­le­ment.

Voilà donc quel­le est la situa­tion. Si vous avez des que­stions, je serai heu­reux d’y répon­dre du mieux que je peux.

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