Le Pape tant aimé par François est aussi son critique le plus sévère

« L’Osservatore Romano » de ce dimanche 24 novembre au matin rapporte quelques citations de l’interview « off the record » que François a eue hier avec les évêques du Japon.  L’article mentionne qu’ « au terme de la rencontre, le Pape a invité les évêques à relire le numéro 80 de l’exhortation apostolique “Evangelii nuntiandi” de saint Paul VI, sur ce qui différencie le bon évangélisateur du mauvais. »

La relecture de l’exhortation apostolique « Evangelii nuntiandi » de Paul VI est très fréquemment recommandée par Jorge Mario Bergoglio.

Cependant, très curieusement, elle est en contradiction flagrante avec ce que recommande, dit et fait le pape actuel en matière de mission.

Voici, en effet, ce que Saint Paul VI écrit dans le n. 80 de ce document :

« Cette ferveur [de l’esprit] exige tout d’abord que nous sachions nous soustraire aux alibis qui peuvent nous détourner de l’évangélisation. Les plus insidieux sont certainement ceux pour lesquels l’on prétend trouver appui dans tel ou tel enseignement du Concile.

C’est ainsi qu’on entend dire trop souvent, sous diverses formes : imposer une vérité, fût-elle celle de l’Evangile, imposer une voie, fût-elle celle du salut, ne peut être qu’une violence à la liberté religieuse. Du reste, ajoute-t-on, pourquoi annoncer l’Evangile puisque tout le monde est sauvé par la droiture du coeur ? L’on sait bien d’ailleurs que le monde et l’histoire sont remplis de “ semences vu Verbe ” : n’est-ce pas une illusion de prétendre porter l’Evangile là où il est déjà dans ces semences que le Seigneur lui-même y a jetées ?

Quiconque se donne la peine d’approfondir, dans les documents conciliaires, les questions que ces alibis y puisent trop superficiellement, trouvera une toute autre vision de la réalité.

Ce serait certes une erreur d’imposer quoi que ce soit à la conscience de nos frères. Mais c’est tout autre chose de proposer à cette conscience la vérité évangélique et le salut en Jésus-Christ en pleine clarté […] : loin d’être un attentat à la liberté religieuse, c’est un hommage à cette liberté […). Les hommes pourront se sauver aussi par d’autres chemins, grâce à la miséricorde de Dieu, même si nous ne leur annonçons pas l’Evangile ; mais nous, pouvons-nous nous sauver si par négligence, par peur, par honte – ce que saint Paul appelait “rougir de l’Evangile” – ou par suite d’idées fausses nous omettons de l’annoncer ? »

Quant à « l’importance primordiale du témoignage de la vie », si chère au pape François mais non moins à son saint prédécesseur, voici comment Paul VI, après l’avoir vivement recommandé, poursuit au n° 22 de la même exhortation apostolique « Evangelii nuntiandi » :

« Cependant cela reste toujours insuffisant, car le plus beau témoignage se révélera à la longue impuissant s’il n’est pas éclairé, justifié – ce que Pierre appelait donner “les raisons de son espérance” -, explicité par une annonce claire, sans équivoque, du Seigneur Jésus. La Bonne Nouvelle proclamée par le témoignage de vie devra donc être tôt ou tard proclamée par la parole de vie. Il n’y a pas d’évangélisation vraie si le nom, l’enseignement, la vie, les promesses, le Règne, le mystère de Jésus de Nazareth Fils de Dieu ne sont pas annoncés. »

Des paroles prophétiques de Paul VI.  Elles semblent également semblant s’adresser à son successeur actuel.

Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso.

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Date de publication: 24/11/2019